— Eh bien, gardez encore ce paquet, Monsieur… c’est tout ce que je possède au monde… il ne me reste que les habits que j’ai sur moi…
Mes larmes que j’avais d’abord contenues à grand’peine, s’échappèrent de nouveau malgré moi, tant j’éprouvais de honte et de chagrin.
— Ah ça… voilà que vous pleurez, — dit le cocher d’une voix moins rude, — c’est donc vrai ce que vous dites là ?
— Cela n’est que trop vrai, Monsieur…
— Qu’allez-vous faire ? Où allez-vous passer la nuit ?
— Je n’en sais rien, — dis-je avec abattement. Et, chose étrange, je me souvins que, bien des années auparavant, j’avais fait la même réponse à la Levrasse après m’être sauvé de chez mon maître le Limousin.
Le cocher parut touché ; il reprit :
— Allons, mon pauvre garçon, ne pleurez pas. Voyons, je ne peux pas perdre ma journée, moi… faut que je compte avec mon bourgeois… mais je ne vous laisserai pas sans le sou… et sur le pavé, par une nuit pareille. Tenez, reprenez ces vingt sous… et votre paquet… Vous trouverez un garni près de la barrière… une lanterne rouge… on y couche à la nuit pour quatre sous… Voilà le numéro de ma voiture… (et il me donna une petite carte). Si un jour vous pouvez me rendre ce que vous me devez, vous me ferez plaisir… car j’ai femme et enfants…
— Oh ! merci… Monsieur, merci, — m’écriai-je avec effusion.
À ce moment, le cabaretier ouvrit la porte ; il soutenait sous le bras l’homme auprès duquel je m’étais