Aller au contenu

Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

coup d’œil de moi, se lève, prend la lettre et la met dans sa poche, après l’avoir vite parcourue.

— Bravo ! Leporello, — fut-il crié tout d’une voix.

— Pendant le temps que mon maître lisait, — reprit-il, — le mari disait en levant le nez en l’air et en se frottant les jambes devant le feu : — Voyons… je connais l’écriture ?… De qui diable ça peut-il être ? — Puis tout-à-coup il s’écrie : — Je parie que c’est une lettre de Fifine ?… — Fifine est un rat de l’Opéra, drôle de petit corps, qui est un peu la maîtresse de tous ces Messieurs du club. — Tu devines tout ! Blinval ! on ne peut rien te cacher — répondit mon pauvre maître, dont le front était couvert de gouttes de sueur. — Eh bien ! — ajouta Leporello, — avouez que, sans mon aplomb, et j’ose dire sans mon intelligence, il arrivait de beaux malheurs, car M. de Blinval est brave comme un lion ; il tire le pistolet comme un dieu, et demain mon maître était mort… si le mari avait vu cette lettre ; ce qui n’empêche pas qu’on dit de nous : Ces canailles de domestiques !

— Ça me rappelle un admirable trait de sang-froid du dernier amant de la duchesse de Rullecourt, — dit Astarté, — et vous pourrez donner, dans l’occasion, la recette à votre maître, Leporello… Cet amant reçoit une lettre de la duchesse dans des circonstances absolument pareilles… sauf qu’il n’avait pas un intelligent Leporello pour le servir… L’imbécile de valet de chambre apporte donc la lettre de la duchesse. — Tiens… — dit le duc à l’amant — une lettre de ma femme ? Elle t’écrit donc ? — L’amant ne répond rien, lit la lettre avec un sang-froid superbe, et répond en-