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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/24

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lettre de Mme de Blinval. C’est très-pressé, me dit le commissionnaire, il faut tout de suite une réponse. Ne me doutant pas le moins du monde que M. de Blinval fût là, j’entre avec la lettre et je vois le mari fumant tranquillement son cigare avec mon maître, et riant comme un… bossu.

— Ah ! mon Dieu !

— Comment vous êtes-vous tiré de là, Leporello ? — s’écrièrent les femmes avec intérêt.

— Mais pas trop mal… — dit Leporello avec fatuité, — pas trop mal… mon maître, me voyant entrer avec la lettre sur mon plateau, tend la main pour la prendre, en me disant : — De qui est cette lettre ? — Le mari était si près, qu’il devait nécessairement reconnaître l’écriture… très-reconnaissable… des jambages longs de ça…

— Mais achevez donc, Leporello ; comme vous nous faites languir ! moi, je suis toute saisie, — dit Juliette.

— Donner un faux nom… ne m’avançait à rien, — reprit Leporello, — la diable d’écriture était toujours là.

— Mais achevez donc, au nom du ciel.

— Reculant alors le plateau hors de la portée de mon maître, et conséquemment hors de la vue du mari, je dis à mon maître en riant : — je ne peux pas donner cette lettre à M. le baron… devant M. le vicomte. — Pourquoi cela ? — me dit mon maître tout bêtement. — Parce que M. le vicomte connaît l’écriture de cette lettre, — ai-je répondu en souriant. — Voyez-vous ce drôle de Leporello ? quel aplomb de Frontin ! — dit le mari en riant aux éclats, tandis que mon maître, averti par un