Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/279

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» Régina a répondu franchement à mon étreinte… Mais dès que j’ai voulu conserver sa main un instant dans la mienne, je l’ai senti, pour ainsi dire, se refroidir… se glacer…

» J’ai regardé ma femme… elle a baissé les yeux ; son visage, d’abord doucement épanoui, est redevenu triste.

» J’ai compris…

» C’était de l’estime, une vive sympathie qu’elle m’avait voulu témoigner… voilà tout.

» Alors, je lui ai dit, avec une résignation dont elle m’a paru touchée :

» — Rien… encore, Régina ? n’est-ce pas ?

» — Rien… — m’a-t-elle répondu.

» Et deux larmes ont coulé sur ses joues.

» Ce coup a été affreux pour moi… je m’étais trop hâté ; j’avais réveillé ses défiances, qui peut-être commençaient de s’assoupir… L’œuvre de tout un mois était perdue… œuvre de patience, de résignation, de contrainte si difficile, si douloureuse !

» Alors, vous le savez, mon ami, j’ai failli désespérer, j’ai failli renoncer à cette tâche, dont seulement alors j’entrevoyais les difficultés terribles, insurmontables… Heureusement, votre austère amitié est venue à mon secours, cette fois encore j’ai suivi vos conseils.

» — Courage et persévérance, — m’avez-vous écrit. — Non, ce n’est pas là du temps perdu ; vous ne pouviez, au contraire, l’employer plus dignement… Il a été perdu peut-être pour l’amour, mais non pour l’estime et pour la considération où Mme de Montbar