Aller au contenu

Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Ah bah ! dirent plusieurs voix avec surprise.

— Et de plus, — poursuivit Mme Lambert, — ruiner complètement le ménage qui est encore plus avare qu’hypocrite, et qui a plus de trois cent mille livres de rentes.

— Dis donc comment ?

— Il fallait pour que le ménage dont je vous parle, héritât d’un oncle immensément riche, que la femme eût un enfant. Voyant qu’elle ne pouvait pas parvenir à être grosse, elle est convenue, d’accord avec son mari, de simuler une grossesse. Il a bien fallu que ma maîtresse, car après tout, c’est de moi que je parle, il a bien fallu que ma maîtresse me mît dans la confidence, moi, sa femme de chambre. Je me suis occupé de trouver une femme grosse, je l’ai logée dans une maison isolée. Ça se passait à la campagne ; ma maîtresse a feint d’être en mal d’enfant dès que l’autre femme a été sur le point d’accoucher ; et c’est moi qui ai reçu l’enfant… un beau garçon, ma foi… Je l’ai apporté dans un carton à chapeau, et quand une bête de sage-femme de campagne, qu’on est allé exprès chercher trop tard, est arrivée, elle a trouvé un gros poupon criant comme un brûlé pour téter la nourrice dont on s’était précautionné.

— En voilà des roués ! — dit Leporello.

— Eh bien ! — reprit Mme Lambert, — vous me croirez si vous voulez, on m’a renvoyée de la maison pour cause… de moralité, parce qu’on avait surpris le cocher dans ma chambre ; ça m’a outrée… J’ai menacé ma maîtresse ; je lui ai dit que je pouvais parler sur bien des choses… Savez-vous ce qu’elle m’a répondu ?