Mme de Montbar se montrait pour moi affectueuse, égale ; elle s’intéressait à mes travaux, me conseillait avec sagesse et discernement, tempérait parfois la fougue de mes opinions. Elle me parlait avec intérêt de l’avenir qui m’était réservé ; des espérances que je pouvais concevoir comme représentant de mon opinion, etc.
» Mais malgré le calme, la tranquillité que Régina affectait, je la surprenais souvent triste, rêveuse ; sa santé s’altérait visiblement, et le sourire avec lequel elle accueillait tout ce que je tentais pour lui plaire avait quelque chose de doucement résigné qui souvent me navrait…
» Son père me disait parfois :
— « Vous êtes excellent pour ma fille ; elle est remplie d’affection pour vous ; votre position se dessine, grandit de jour, et pourtant ces pressentiments de père, qui trompent rarement, me disent qu’il y a quelque chose entre vous. »
» J’ai dû rassurer M. de Noirlieu, et j’ai, je crois, en partie réussi.
» Tel était l’état des choses, mon ami, lors de ma dernière lettre. Si je vous rappelle ces faits, c’est qu’en vous écrivant aujourd’hui, j’ai eu besoin de me les rappeler à moi-même, afin d’embrasser d’un seul coup d’œil ma position présente et passée.
» Par une de ces idées qui ne peuvent venir qu’aux sots aveuglés par une fatuité stupide ou aux gens désespérés qui, comme moi, se rattachent à la plus folle espérance, ou plutôt se créent à eux-mêmes de folles espérances, je m’imaginai un jour que la préoccupation, que la tristesse de Régina, que l’altération croissante de