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sa santé étaient causés par l’embarras, par l’espèce de honte qu’elle éprouvait à m’avouer, que mon amour, si dédaigné d’abord, regagnait chaque jour dans son cœur la place que j’y avais perdue.

» Selon moi, se joignait à cette transformation des sentiments de Régina une généreuse compassion pour Just, qu’elle me sacrifiait ainsi ; compassion suivie de regrets, de remords même… mais qui cédait au réveil passionné du premier amour de Régina.

» Et puis enfin, comme depuis ma première et malheureuse tentative, je m’étais toujours tenu dans les bornes d’une affection toute amicale envers ma femme, l’occasion de me témoigner du changement de ses sentiments pour moi lui avait manqué, — me disais-je… — De tels aveux en pareille circonstance, et pour elle sur tout, étaient toujours d’une délicatesse extrême.

» Ces interprétations de la conduite de Mme de Montbar, une fois admises par moi, je ne trouvai que trop de raisons de les justifier et de persévérer dans ma croyance ; car, vous me l’avez souvent écrit, mon ami, avec votre inflexible droiture : — le mal et le faux, comme le bien et le vrai, ont leur logique irrésistible, fatale.

» Ainsi, les manières affectueuses, mais toujours réservées, de Régina, la prudence, la discrétion qu’elle montrait dans le choix même de ses expressions lorsqu’elle me parlait de son estime, de son amitié, de sa reconnaissance ; tout cela, selon moi, n’était de sa part que contrainte, apparence, et, à la première circonstance favorable, la réalité devait m’apparaître.

» Après de longues hésitations… d’instinct sans doute et qui auraient dû m’avertir, je me décidai à savoir