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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/393

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d’une manière si effrayante, que la pupille s’entoura d’un cercle de blanc.

Les lèvres de Scipion s’agitèrent alors faiblement comme s’il eût voulu parler.

Le comte s’en aperçut, et murmura ces paroles, les seules… toujours les seules, qui venaient à son esprit troublé :

— Il va me dire : Tu as tué ton fils ! tu as tué ton fils !

Scipion se prit bientôt à sourire d’une façon étrange, et dit d’une voix de plus en plus affaiblie, qui expira avec son dernier soupir :

— Tu m’as… tué… mais… c’est égal… j’ai gagné… Tu n’épouseras pas… Madame… Wilson… c’est ta faute… Je suis… ton exemple… j’ai fait ce que tu as fait… tu sais… la princesse… de Montbar… Dis donc, qui aurait cru pourtant que le jeune père… deviendrait le père assassin, c’est drôle… Je vais… conter ça… à grand papa Du-Riz-de-veau

Au seuil de l’éternité, cet indomptable et malheureux enfant terminait sa courte vie par un dernier sarcasme.

— Scipion… mon fils… ne meurs pas ! — s’écria le comte d’une voix terrible, car la réalité le rappelait à lui.

Et se jetant à corps perdu sur le cadavre de son fils, il couvrit son visage, ses cheveux, ses mains, de baisers insensés.

Un souvenir fugitif comme l’éclair vint rappeler à la pensée de Martin, comme contraste d’un redoutable enseignement, la mort sublime du docteur Clément… les paroles remplies de grandeur et de sérénité que lui et