Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/124

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— On dit ça, c’est bien possible… la petite Bruyère ne l’aimerait pas tant, si ça n’était pas un bon homme.

— On les voit souvent ensemble, depuis quelque temps.

— Elle aura, bien sûr, aussi charmé le braconnier, la charmeuse qu’elle est.

— Oh ! oui, qu’elle est charmeuse et charmée ; car enfin, — dit naïvement la pauvre et repoussante Robin, — il n’y a qu’à la regarder à côté de moi… avec ses pieds mignons, ses jambes mignonnes, ses mains mignonnes, sa taille mignonne, quoiqu’elle ait seize ans ; à côté de moi, elle n’a l’air de rien du tout… bien sûr donc qu’elle est charmée.

— Et si elle ne l’était pas, pourquoi, qu’au lieu de coucher avec nous pêle-mêle dans l’étable, elle a voulu, même toute petite, percher seule dans le perchoir avec ses dindes ?

— C’est ce qui te chiffonne, mon gars ; t’aurais voulu aussi bêtiser avec elle, toi ! dit la Robin en riant bruyamment et allongeant à son voisin de droite un vigoureux coup de poing dans les côtes ; celui-ci, pour ne pas avoir le dernier, se pencha derrière la Robin, et bourra rudement le dos de l’autre charretier qui sommeillait ; lequel charretier, au fait du jeu, riposta en donnant un grand coup de pied au petit vacher : l’enfant, toujours frissonnant, tâcha de sourire, et ne rendit le coup de pied à personne.

— Et c’est pas toi, la Robin, qui aurais fait comme la petite Bruyère, — reprit le charretier tou-