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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/75

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— C’est jouer à me faire égorger par ce bandit, — dit M. Dumolard en gémissant. — Avec ça, ces maudits habits rouges sont si voyants… Il m’apercevra d’une lieue ;… mais c’est affreux… Appeler à moi,… c’est attirer le brigand, s’il est dans ces parages… Voyons, suivons le fossé… sa berge peut aboutir à un sentier.

Et M. Dumolard suivit piteusement le revers du fossé jusqu’à un endroit où il faisait un coude, prolongeant un taillis de chênes impénétrable ; s’engager dans ce sombre fouillis de branches croisées, entrelacées, où aucun chemin n’était frayé, semblait à M. Dumolard presque aussi effrayant que de sauter l’énorme fossé, car pour percer dans un pareil fort, il faut s’abandonner à l’instinct et à l’adresse de son cheval, baisser la tête, la protéger avec son coude, et marcher aveuglément.

Malgré la frayeur que lui causait cet expédient, M. Dumolard, voyant la nuit approcher, et réfléchissant que s’il restait ainsi, vaguant sous cette futaie claire, son maudit habit rouge le ferait peut-être apercevoir de loin, et attirerait le brigand à ses trousses, M. Dumolard de deux maux choisit le moindre, et tenta de faire une trouée à travers le taillis, dans l’espoir de rejoindre les chasseurs ; bientôt on entendit dans cette enceinte un brisement de branches aussi formidable que si un sanglier eût traversé cet épais fourré.

Abandonnons M. Dumolard aux hasards de sa tentative, et expliquons en deux mots le prodige que l’on attendait de ce chien renommé, à la voix duquel les