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chées çà et là sous l’herbe qui envahissait la cour. On eût dit les pierres sépulcrales d’un cimetière abandonné.

Toutes les fenêtres étaient extérieurement fermées ; la porte vitrée du vestibule cria sur ses gonds rouillés, et fit retentir d’un bruit lugubre la voûte sonore du grand escalier.

Le colonel habitait le rez-de-chaussée. Le domestique conduisit les deux jeunes gens dans un immense salon à peine meublé ; ses hautes fenêtres sans rideaux et à petits carreaux s’ouvraient sur un jardin entouré de grandes murailles, triste comme un jardin de cloître.

— Monsieur le colonel va venir à l’instant, — dit le domestique ; — et il disparut.

Le jour était sombre, bas ; le vent gémissait tristement à travers les portes mal closes. Tout dans cette demeure révélait, non pas la misère, non pas l’incurie, mais la plus profonde insouciance du bien-être matériel.

Alfred et Gaston se regardèrent quelques moments en silence.

— Depuis que nous sommes entrés, — dit Alfred en frissonnant de froid, — on dirait