Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/221

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gère cuisson, et il me resta une petite tache livide à la peau[1].

Je ne devais pas sans doute m’étonner de la propriété vénéneuse de ces fleurs ; mais en songeant qu’elles venaient de cet homme qui m’inspirait tant d’effroi, il me fut impossible de ne pas faire des rapprochements sinistres en pensant qu’il y avait quelque chose de fatal, de mortel jusque dans son présent. Saisie de terreur, je jetai cet affreux bouquet au milieu des camélias qui se trouvaient près de moi.

M. Lugarto sourit et me dit :

— On dirait que vous avez été mordue par un serpent ; il est bien dommage que vous ne puissiez pas jeter aussi loin de vous ces grappes des mêmes fleurs qui ornent vos beaux cheveux ; je suis heureux malgré vous, de vous voir obligée de les garder.

— Oh ! Madame, — dis-je à voix basse à madame de Richeville, — ce qui se passe ici a l’air d’un rêve terrible ; emmenez-moi d’ici, je vous en conjure, allons retrouver M. de Lancry ; je désire me retirer.

  1. Le suc de l’euphorbe est un très violent poison.