Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/292

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quelques traits de mademoiselle de Maran, pour la première fois de ma vie j’appris qu’il existait des êtres méchants et pervers… Quand je voyais M. de Mortagne, je l’accablais de questions à votre sujet ; vous étiez pour moi, Madame, la personnification de la douleur et de la résignation. Je partis pour d’assez longs voyages ; bien souvent, en songeant à mon père, à la France, je donnais une triste pensée à la pauvre orpheline abandonnée aux méchants caprices d’une femme impitoyable. Si vous saviez, Madame, la haine invincible que m’a toujours inspirée l’abus de la force ; si vous saviez combien j’ai toujours pris le parti du faible contre le puissant, vous ne vous étonneriez pas de m’entendre parler ainsi du profond intérêt que vous m’inspiriez déjà.

— Je vous en sais gré, monsieur, croyez-le…

— À mon retour, je trouvai M. de Mortagne à Paris ; il vint nous apprendre, à mon père et à moi, l’issue de la scène violente à la suite de laquelle votre conseil de famille, Madame, vous avait laissée sous la tutelle de mademoiselle de Maran. Alors seulement mon père me