Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/44

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malheureux : ils les faisaient, mais Dieu sait comme ! cela ne servait à rien, c’était de la matière première perdue que feu M. le marquis payait ; non content de cela, il me remboursait les petites sommes que je donnais à ces pauvres vieux censément pour prix de leurs ouvrages, de façon qu’ils croyaient gagner par leur travail les douceurs qu’ils se procuraient ainsi…

— Mais c’est que c’est, en effet, d’une superlative délicatesse ! — s’écria mademoiselle de Maran, — et c’est bien raisonné surtout ! car enfin, jugez donc ! si ces messieurs les vagabonds étaient venus à s’apercevoir que ce M. de Rochegune se permettait de leur faire l’aumône en tout et pour tout, c’est qu’ils auraient pu se révolter au moins ! joliment rabrouer cet impertinent marquis, et profiter d’une nuit où il serait venu coucher dans leur dortoir pour lui donner une bonne traversinade qu’il n’aurait pas volée.

L’amertume avec laquelle mademoiselle de Maran raillait une action d’une délicatesse peut-être outrée, mais qui révélait du moins la plus touchante bonté, prouvait combien elle