Page:Sue - Mathilde, tome 2.djvu/65

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quitter. Au moins votre jolie et jeune figure animait un peu cette maison… Je suis bien vieille… et à cet âge il est triste de rester toute seule, d’attendre son dernier jour avec un chien pour tout compagnon, et puis de mourir seule… sans être plainte, sans être regrettée.

Après quelques moments de sombre silence, elle reprit avec douceur : — Mathilde… soyez généreuse, ne vous en allez pas d’ici avec un mauvais ressentiment de moi, cela rendrait ma solitude plus pénible encore !

Mademoiselle de Maran devait être sincère en me parlant ainsi. Les caractères les plus méchants ne sont pas à l’abri de certains retours sur eux-mêmes. D’ailleurs l’expression de ses traits, de sa voix, trahissait son émotion. Elle n’avait aucun intérêt à jouer cette comédie devant moi.

Je fus profondément sensible à cette preuve d’intérêt, la seule que ma tante m’eût jamais donnée. J’avais été plus joyeuse que touchée de son consentement à mon mariage avec Gontran. Je savais qu’à la rigueur j’aurais pu me passer de son adhésion ; et, sans exagéra-