Page:Sue - Mathilde, tome 3.djvu/18

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— Allez toujours, je vous répondrai plus tard… C’est étonnant comme vous êtes perspicace.

— Eh bien ! Madame, je vais vous porter un bien terrible coup… je vais d’un seul coup me venger, me cruellement venger de tout le mal que vous m’avez fait, de celui que vous avez voulu me faire.

— C’est étonnant… vous ne m’effrayez pas du tout, chère petite.

— Regardez-moi bien en face, Madame ; écoutez bien l’accent de ma voix, remarquez bien l’expression de mes traits… vous si pénétrante, vous verrez si je mens.

— Au fait… au fait, dit mademoiselle de Maran avec aigreur.

— Eh bien ! Madame, j’aime Gontran autant que je l’ai jamais aimé… entendez-vous ?… Je l’aime avec passion, je l’aime plus encore qu’autrefois, car il est malheureux… Cet amour-là, c’est ma force, c’est mon courage, c’est ma consolation ; grâce à cet amour, je suis déjà sortie, meurtrie peut-être, mais souriante, des luttes les plus cruelles… Grâce à cet amour, enfin, je défie l’avenir d’un front calme et serein.