Page:Sue - Mathilde, tome 3.djvu/19

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Il y avait un tel accent de vérité dans mes paroles ; mon visage, ranimé par la puissance de mes convictions, était sans doute si radieux que mademoiselle de Maran, ne pouvant cacher sa rage, s’écria :

— C’est qu’elle est capable de dire vrai ! C’est qu’il y a pourtant des femmes assez imbéciles pour s’ensorceler ainsi d’un homme ! Les vilaines stupides, on les assommerait à coups de bûche, qu’elles s’écrieraient encore avec toutes sortes de voluptés langoureuses, comme les convulsionnaires du diacre de Pâris : — Ô douceur charmante !… ô ravissement ineffable !

Puis, revenant involontairement à ses habitudes d’autrefois, mademoiselle de Maran me serra violemment le bras, en s’écriant :

— Mais vous êtes donc aveugle, sotte ou folle ?

La colère de ma tante me fit du bien ; mon amour pour Gontran était compris ; il pouvait, il devait me consoler de tout, puisque mademoiselle de Maran était si furieuse de me le voir ressentir.