Page:Sue - Mathilde, tome 3.djvu/70

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force et de volonté qui existât encore en moi…

M. Lugarto se leva, regarda la pendule et me dit : — Dans dix minutes vous serez à moi.

En faisant un mouvement désespéré pour me soulever du fauteuil où j’étais engourdie, mes yeux tombèrent sur un couteau.

Maintenant je me rappelle à peine les violentes pensées qui m’agitèrent en ce moment ; soit que je voulusse échapper par la mort au déshonneur, soit que je crusse qu’une douleur, que la perte de mon sang peut-être, m’arracheraient de l’état affreux où j’étais plongée, je saisis ce couteau, je rassemblai toute mon énergie pour m’en porter un coup dans la poitrine ; la lame glissa et m’atteignit légèrement à l’épaule.

Ce mouvement fut si rapide que M. Lugarto ne l’aperçut pas.

Une voix bien connue s’écria avec effroi :

— Arrêtez, Mathilde !

Je me relevai toute droite par un mouvement presque convulsif, et je fis deux pas en étendant mes bras vers M. de Mortagne, car c’était lui…