Page:Sue - Mathilde, tome 4.djvu/270

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Mon mari parut frappé de mon expression de froideur insouciante.

— Votre langage est nouveau pour moi, Mathilde.

— Il doit être aussi nouveau que le sentiment qui le dicte… aussi nouveau que l’aveu que je vais vous faire.

— Mais, de grâce, expliquez-vous.

— Après ce long coup-d’œil jeté sur le passé, j’ai fait encore une découverte… une découverte affreuse, je vous le jure, c’est que mes chagrins, pourtant si vrais, si douloureux, étaient à peine dignes d’intérêt… c’est que mes lamentations continuelles étaient plus fastidieuses que touchantes, c’est que mes larmes éternelles avaient dû, avec raison, vous impatienter, vous exaspérer, mais rarement vous apitoyer.

— Raillez-vous, Mathilde ? la raillerie serait cruelle.

Je pris mon mari par la main, je le menai devant la glace, et là, lui montrant mon visage flétri, je lui dis :

— Pour que je sois ainsi changée, il m’a fallu bien souffrir, n’est-ce pas, Gontran ! Eh