Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/132

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de prendre la résolution que je viens de prendre. — Eh bien !… pendant deux jours, j’ai lutté… j’ai combattu, oh ! douloureusement combattu ; — mais l’intérêt de mon amour l’emporte ; — cet amour est ma vie maintenant. — Ce n’est pas de l’égoïsme, de la cruauté ; c’est de l’instinct de conservation… J’ai un moyen sûr de séparer M. de Rochegune de Mathilde : — je vais écrire à Gontran sans lui dire où je suis, je lui promettrai de le revoir s’il peut décider Mathilde à revenir habiter avec lui. — Je le sais, je risque de pousser leur passion à l’extrême… de les forcer à fuir peut-être pour échapper à M. de Lancry ; mais je ne peux pas être plus malheureuse que je ne le suis ; — je ne puis rien perdre, je puis tout gagner.

Gontran ne résistera pas à cette demande ; mon influence sur lui est absolue, j’en suis certaine. — Mais une fois Mathilde au pouvoir de M. de Lancry, que ferai-je, moi ?… Oserai-je affronter les regards de celui dont la seule pensée me trouble, m’impose, me consterne et m’enivre ? — N’aime-t-il pas Mathilde avec passion ? — S’il peut seulement soupçonner