Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/200

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Pendant les premiers temps qui suivirent la réception de la lettre de M. Lugarto, j’eus des rêves horribles ; mais peu à peu ils cessèrent : je m’habituai à cette position qui m’avait d’abord semblé effrayante et presque intolérable.

Je voyais rarement M. de Lancry ; il avait sans doute perdu tout espoir de retrouver Ursule, malgré la soumission avec laquelle il avait obéi à ses ordres à mon égard.

Si j’avais insisté auprès de mon mari pour obtenir notre séparation, il y aurait peut-être consenti ; mais, pour mille raisons que l’on comprend, j’étais obligée non-seulement de rester quelque temps encore dans cette position, mais de paraître l’accepter avec joie.

Ma vie était très uniforme ; je voyais presque tous les jours madame de Richeville et Emma, je ne recevais personne chez moi. Le jour, je dessinais, je brodais ; puis j’allais faire quelques promenades au parc de Monceaux, ou quelques visites au bon prince d’Héricourt et à sa femme, qui m’avaient conservé leur amitié, tout en me grondant avec bienveillance au sujet de mon fol amour et de mon dévouement si mal placé.