Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/66

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bonté, tous les sentiments enfin, excepté de l’amour.

— Et c’est pourtant le seul, ou plutôt le plus vif de ceux qui me ramènent à lui — m’écriai-je, pour mettre un terme à cette scène cruelle. — Oui, dussiez-vous me mépriser… en lui j’aime le premier homme qui ait fait battre mon cœur ; en lui j’aime… mon mari… en lui j’aime mon amant… oui, mon amant, et c’est pour cela que je veux retourner auprès de lui.

M. de Rochegune cacha son front dans ses mains et resta long-temps silencieux.

Puis il dit à demi-voix, et comme s’il s’était écouté penser :

— Cela est étrange ! je me l’étais toujours dit… mais je ne l’aurais jamais cru… il fallait voir ce que je vois.

— Qu’avez-vous — m’écriai-je, effrayée de son air presque égaré — qu’avez-vous ?

— Un phénomène bizarre se passe en moi, Mathilde — continua-t-il en se parlant à lui-même — oui… oui…, mes espérances, mes convictions tombent lentement… une à une… Elles tombent comme les feuilles mortes d’un