Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Votre cœur n’est pas libre, et vous aimez sans espoir.

« On a cru que cette confidence imposait des devoirs parce qu’elle vous présageait des chagrins. Ceux qui ont souffert doivent venir à ceux qui souffrent ; si votre amour continue d’être malheureux, peut-être au milieu de vos tristesses accueillerez-vous avec reconnaissance la consolation d’un cœur tendre et dévoué qui, mieux que tout autre, saura compatir à votre douleur.

« Si vous êtes heureux, vous serez généreux, et vous aurez quelques bonnes et douces paroles pour l’amie inconnue qui oubliera ses chagrins en songeant à vos souffrances ou à votre bonheur… Vous êtes si loyal que vous ne suspecterez pas la loyauté des autres. Le but de cette correspondance n’est pas de tendre un piége à votre affection, ou de profiter d’un moment de dépit pour vous offrir de nouveau un cœur que vous avez repoussé ; vous croirez cela parce que vous savez qu’il est des âmes dignes de la vôtre ; vous croirez cela parce que, quoi qu’il arrive, jamais vous ne saurez qui vous écrit.

« Enfin, vous ne verrez dans cette résolution ni orgueil froissé, ni amertume. L’élévation du sentiment qui dicte cette lettre le met hors d’atteinte de ces misérables passions. Le sort a voulu que cette offre d’un cœur dévoué vous fût faite trop tôt ou trop tard… Ce cœur n’en est pas moins à vous, c’est-à-dire toujours digne de vous.