Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Léon de Morville, on pourrait croire que vos séductions ont échoué contre sa fidélité à lady Melford… vous dites trop de mal de lui pour ne pas lui avoir voulu… trop de bien.

— Vraiment, Gercourt — reprit gaiement le domino — tu me parais très bienveillant aujourd’hui… Est-ce qu’on joue ta comédie demain ?

— Comment, beau masque ! vous me croyez intéressé à ce point ?

— Sans doute… un homme du monde comme toi… à la mode comme toi… d’esprit comme toi… qui ose se permettre d’avoir plus d’esprit que les autres… hommes d’esprit, bien entendu, est condamné à toutes sortes de fâcheux ménagements… Malgré cela, si ta comédie tombe… n’en accuse que tes amis.

— Je ne serai pas si injuste, beau masque, si ma comédie tombe, je n’accuserai que moi… Quand on a des amis comme Léon de Morville, dont vous dites un mal si flatteur, on croit à l’amitié.

— Tu vas recommencer notre querelle ?

— Sans doute.

— Soutenir que Léon de Morville a de l’esprit ?

— Malheureusement pour lui, il est très beau ; aussi les envieux aiment-ils à supposer qu’il est très bête… S’il était louche, bègue ou bossu… peste !… on ne s’aviserait pas de contester son esprit. De nos jours il est inouï combien la laideur a d’avantages.

— Tu dis cela pour la plupart de nos hommes