Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/199

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l’a plus inquiétée, son agitation a encore augmenté ; j’étais, comme d’habitude, venue avec ses femmes, elle les a renvoyées et m’a gardée seule… Alors elle a pleuré, oh ! bien longtemps pleuré.

— Elle a pleuré !

— Et moi-même je n’ai pu retenir mes larmes.

— Elle avait l’air bien courroucée, n’est-ce pas ?

— Elle… oh non, mon Dieu ! au contraire, elle était abattue, accablée ; elle levait de temps en temps les mains et les yeux au ciel, puis ses larmes recommençaient de couler… Vers une heure elle a sonné ses femmes, on l’a déshabillée, elle est restée seule avec moi ; alors, au lieu de se coucher, elle s’est mise à écrire sur son livre noir à secret, où elle écrit toujours, je l’ai remarqué, lorsqu’il lui arrive quelque chose d’extraordinaire… Je lui ai dit qu’elle allait se fatiguer encore ; elle m’a répondu que non, que cela la calmerait au contraire. Je l’ai quittée vers les quatre heures du matin. Voyant encore de la lumière chez elle, je suis entrée doucement ; elle écrivait toujours.

Ce que venait de dire la mulâtresse (elle mentait complètement à l’endroit du livre noir et de l’accablement de la princesse) était pour M. de Brévannes d’un prix inestimable. Il se figura que sa rencontre imprévue avait causé l’agitation, l’anxiété, les larmes de la princesse. Il ignorait que madame de Hansfeld l’avait déjà vu au bal de l’Opéra, il s’étonnait seulement qu’elle eût paru plus accablée qu’irritée de cette rencontre.