Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/227

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partez… et remerciez-moi à genoux d’être aussi clément que je le suis.

Madame de Hansfeld regardait son mari avec épouvante ; elle n’avait à se reprocher que son amour pour M. de Morville, et cet amour ne méritait pas les reproches affreux dont l’accablait le prince. Celui-ci pourtant semblait plein de raison ; il n’y avait rien d’égaré dans son regard, d’altéré dans son accent. Voulant voir s’il ferait allusion à l’amour qu’elle ressentait pour M. de Morville, amour que, par un hasard inexplicable, M. de Hansfeld avait peut-être pénétré, elle lui dit :

— Lorsque je vous ai épousé, monsieur, je vous l’ai dit loyalement… mon cœur n’était pas libre… j’ai aimé, passionnément aimé… Ce que je vous disais alors, à cette heure je vous le répète… Je ne vous aime pas d’amour ; mais devant Dieu qui m’entend, jamais je ne vous ai été infidèle….

— M’être infidèle ! — s’écria le prince — ce serait une action louable auprès des crimes que vous avez commis.

— Moi ! — s’écria Paula en joignant les mains avec force — mais c’est une calomnie aussi infâme qu’absurde…

— Comment… vous oserez nier qu’hier soir… Oh ! non, jamais ! — s’écria le prince en frémissant ; — jamais machination plus infernale n’est entrée dans une tête humaine. J’ai frissonné d’épouvante autant que de surprise… Et vous n’êtes pas à genoux… devant moi, les mains suppliantes…