Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/27

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regards, de sourires, de prévenances que pour lui ; il savait répondre à cette bienveillance générale avec tant de tact et de spirituelle modestie, qu’il ne blessait aucun amour-propre ; sans sa fidélité romanesque pour une femme qu’il avait éperdument aimée, et dont il ne s’était séparé que par la force des circonstances, il aurait eu les plus nombreux, les plus brillants succès.

M. de Morville était surtout doué d’un grand charme de manières ; son affabilité naturelle lui inspirait toujours des paroles aimables ou flatteuses ; la douce égalité de son caractère n’était même jamais altérée par les déceptions qui devaient blesser de temps à autre cette âme délicate et sensible.

Peut-être son caractère manquait-il un peu de virilité ; loin d’être hardiment agressif à ce qui était misérable et injuste, loin de rendre le mal pour le mal, loin de punir les perfidies que sa générosité encourageait souvent, M. de Morville avait une telle horreur ou plutôt un tel dégoût des laideurs humaines, qu’il détournait ses yeux des coupables au lieu de s’en venger.

Au lieu d’écraser un immonde reptile, il aurait cherché du regard quelque fleur parfumée, quelque nid de blanche tourterelle, quelque horizon riant et pur, pour reposer, pour consoler sa vue.

Ce système de commisération infinie vous expose souvent à être de nouveau mordu par le reptile, alors que vous regardez au ciel pour ne pas le