Page:Sue - Paula Monti, tome 1, 1845.djvu/59

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suivi ses desseins sur elle avec une ténacité si énergique.

La pauvre Berthe confondait, hélas ! l’entêtement orgueilleux d’un esprit impatient de toute résistance avec l’abnégation, avec l’opiniâtre dévouement de la passion.

M. de Brévannes était capable d’employer tous les moyens possibles, même les voies en apparence les plus honorables, pour parvenir à ses fins ; mais, le but atteint, il était capable aussi de se venger cruellement des sacrifices qu’il s’était imposés lui-même pour triompher dans une lutte où son orgueil était aussi vivement intéressé que son amour.

Pour ce caractère intraitable, le lendemain de la victoire était rarement heureux ; plus l’attaque avait été rude, plus la résistance avait duré, plus sa vanité souffrait. Dans la chaleur de l’action, il oubliait les blessures de son amour-propre ; mais, après le succès, il ressentait douloureusement ces plaies saignantes, et son caractère véritable reprenait le dessus.

Lorsque la fièvre de vouloir acharné qui avait contraint M. de Brévannes à épouser Berthe eut cessé, il eut des regrets extrêmes de ce mariage… Oui… il eut honte de son alliance avec une fille obscure et pauvre ; en songeant aux riches partis auxquels il aurait pu prétendre, les qualités charmantes, la beauté, l’âme angélique de Berthe lui parurent à peine une consolation. Il se crut en butte à tous les sarcasmes ; il ne devait pas y avoir de