Page:Sue - Paula Monti, tome 2, 1845.djvu/42

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sucré que je prenais chaque soir ; je sus gré à Paula de cette attention dont pourtant je ne profitai pas… J’avais un épagneul que j’affectionnais beaucoup… Machinalement je lui présentai la tasse que Paula m’avait apprêtée ; il la but avidement, et presque aussitôt le malheureux animal tomba par terre, trembla convulsivement, et mourut après quelques minutes d’agonie…

— Oh ! je comprends… mais cela est horrible… — s’écria Pierre Raimond.

Berthe regarda son père avec surprise.

— Qu’y a-t-il donc, mon père ?… — dit-elle ; — puis, éclairée par un moment de réflexion, elle ajouta avec horreur : — Oh ! non, non, c’est impossible… monsieur Arnold… c’est impossible ! une femme est incapable d’un crime si affreux.

— N’est-ce pas ? — reprit Arnold avec amertume. — Après quelques réflexions, j’ai dit comme vous… c’est impossible… j’ai attribué au hasard ce fait effrayant, je me suis même cruellement reproché d’avoir pu un moment soupçonner Paula.

— Et lorsque vous revîtes votre femme — dit Pierre Raimond — quel fut son accueil ?

— Il fut calme, confiant ; et si j’avais alors conservé quelques doutes, ils eussent été à l’instant dissipés : le soir j’avais laissé Paula sombre, presque courroucée ; le lendemain je la trouvai tranquille, affectueuse et bonne… elle me tendit la main en me demandant pardon de m’avoir si brusquement quitté la veille…