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Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1865-1866.djvu/172

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UNE AURORE


a paul colin


 
Le phare sent mourir ses lueurs argentées,
Et du golfe arrondi les pentes enchantées
Vont se dorer dans l’aube où le regard les perd.
Les villages marins dorment. L’Océan vert,
Qui n’a pas de sommeil, fait sa grande descente.
Il réclame son lit, et de loin gémissante
L’onde écume ; elle accourt, s’écroule en s’étalant,
Couvre le fin tapis du sable étincelant,
Et, par un lent retour lavant la plage lisse,
Sous l’onde renaissante, à bout de force, glisse.
Sur la sphère liquide aux éclairs de métaux
Une invisible main fait pencher les bateaux.
Il passe des zéphyrs pleins de fraîcheurs salées.
Et voici que là-bas, par monts et par vallées,