Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/18

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nous engage trop ? Ces scrupules, nous auraient arrêté, si en effet nous avions cru signer une promesse, offrir autre chose au lecteur qu’une étude littéraire et philosophique. C’est donc une étude, rien de plus, et il y paraîtra, car nous nous sommes imposé la tâche, trop souvent puérile, de ne pas excéder dans notre traduction le nombre des vers du texte, nous permettant seulement de les intervertir quand le sens pouvait s’y prêter. Nous avons adopté l’excellente édition allemande de Jacob Bernays, qui fait partie de la collection des auteurs grecs et latins de Teubner.

Passionnément épris du génie de Lucrèce, nous sommes loin toutefois d’épouser la doctrine des atomes, qui, d’ailleurs, ne lui appartient pas : ce que nous admirons sans réserve, c’est le grand souffle d’indépendance qui traverse l’œuvre tout entière et qu’on y aspire avec enthousiasme.

La préface qu’on va lire n’est pas une critique directe de notre auteur, mais elle en contient implicitement le commentaire et sépare notre opinion de la sienne. Comme, en exposant nos idées, nous avons nécessairement rencontré les deux principaux courants de la pensée dans tous les temps, le matérialisme et le spiritualisme, on comprendra que nous ayons été entraîné fort loin, et l’on s’étonnera moins des proportions exagérées que cette préface a malgré nous dû prendre.

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