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Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/258

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Pour endormir le doute il rêve d’allier
La raison et la foi, la nature et la grâce,
Que nul génie, hélas ! ne peut concilier. »

Ah ! dans cet âge ardent quelle étrange mêlée
D’actes de foi prescrits par la loi révélée
Et d’arguments subtils par l’esprit découverts !
La vérité n’a point des fondements divers,
Et Faustus cherche encor l’unique et ferme assise
Où se puisse assurer sa croyance indécise.

Il néglige ces grands mais stériles essais ;
Deux hommes en feront table rase à jamais :
Bacon, Descartes ! Gloire à leurs deux disciplines !
Par elles Archimède et Socrate auront pu,
Sur la matière, l’âme et les choses divines,
Voir renaître et mûrir leur songe interrompu.

« Sentant que l’Être échappe aux sciences humaines,
Qu’à leurs prises toujours l’Absolu se soustrait,
Enfin François Bacon se fie aux phénomènes,
Les observe, les classe et suit leur fil secret.
Il enseigne à saisir, sous leur flux qui varie,
Leurs lois, seul objet sûr et fixe du savoir…
L’homme abjure à regret sa noble rêverie,
Les yeux encore épris de l’impossible à voir.

« Descartes, fondateur nouveau de la pensée,
Sur tout ce qu’il a su fait une nuit sensée.