Ah ! que sont devenus, ô peuple ! et ta puissance
Et tes guerriers si redoutés !
Le plus fameux du nord, jadis, par ta vaillance,
Le plus grand par tes cités ?
Ces monts couverts partout de tentes blanches
Retentissaient des exploits de tes preux,
Dont l’œil étincelant reflétait sous les branches
L’éclair brillant des cieux.
Libres comme l’oiseau qui planait sur leurs têtes,
Rien ne pouvait gêner leurs pas.
Leurs jours étaient remplis et de joie et de fêtes,
De chasse et de combats.
Et, dédaignant des entraves factices,
Suivant leur gré leurs demeures changeaient.
Ils trouvaient en tous lieux des ombrages propices,
Des ruisseaux qui coulaient.
Au milieu des tournois sur les ondes limpides
Et des cris tumultueux,
Comme des cygnes blancs dans leurs courses rapides,
Leurs esquifs capricieux,
Joyeux voguaient sur le flot qui murmure
En écumant sous les coups d’avirons.
Ah ! fleuve Saint-Laurent, que ton onde était pure
Sous la nef des Hurons !
Tantôt ils poursuivaient de leurs flèches sifflantes
La renne qui pleure en mourant ;
Et tantôt sous les coups de leurs haches sanglantes
L’ours tombait en mugissant.
Et, fiers chasseurs, ils chantaient leur victoire
Par des refrains qu’inspira la valeur.
Ah ! pourquoi rappeler aujourd’hui la mémoire
De ces jours de grandeur ?
« Hélas ! puis-je, joyeux, en l’air brandir la lance
Et chanter aussi mes exploits ?
Ai-je bravé comme eux, au jour de la vaillance,
La hache des Iroquois ?
Non, je n’ai point, sentinelle furtive,
Près de leur camp surpris des ennemis,
Et je n’ai pas vengé la dépouille plaintive
De parents et d’amis.
« Tous ces preux, descendus dans la tombe éternelle,
Dorment couchés sous ces guérets ;
De leur pays chéri la grandeur solennelle
Tombait avec les forêts.