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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS


Leur nom, leurs jeux, leurs fêtes, leur histoire
Sont avec eux enfouis pour toujours,
Et je suis resté seul pour dire leur mémoire
Aux peuples de nos jours !

« Orgueilleux aujourd’hui qu’ils ont mon héritage,
Ces peuples font rouler leurs chars
Où jadis s’assemblait, sous le sacré feuillage,
Le conseil de nos vieillards.
Au sein du bruit leurs somptueux cortèges
Avec fracas vont profaner ces lieux !
Et les bruyants éclats des rires sacrilèges
Y montent jusqu’aux cieux.

« Mais il viendra pour eux le jour de la vengeance,
Et l’on brisera leurs tombeaux.
Des peuples inconnus, comme un torrent immense,
Ravageront leurs coteaux.
Sur les débris de leurs cités pompeuses
Le pâtre assis alors ne saura pas
Dans ce vaste désert quelles cendres fameuses
Jaillissent sous ses pas.

« Qui sait ? peut-être alors renaîtront sur ces rives
Et les Indiens et leurs forêts ;
En reprenant leurs corps, leurs ombres fugitives
Couvriront tous ces guérets ;
Et, se levant comme après un long rêve,
Ils reverront partout les mêmes lieux,
Les sapins descendant jusqu’aux flots sur la grève,
En haut les mêmes cieux. »

À l’arrivée de Louis Hébert, il y avait déjà dans le pays quelques hommes, non mariés, il est vrai, mais tous assez jeunes et que nous devons considérer comme des Canadiens-français, puisqu’ils s’établirent et furent la souche de la nation.

Honorable homme Nicolas Marsolet, sieur de Saint-Aignan, de Rouen, né en 1587, arriva, avec Champlain, à la fondation de Québec[1], et fut employé presque toute sa vie comme interprète montagnais et algonquin. À la prise de Québec (1629), il passa aux Anglais, ce qui lui fut reproché ; mais il prétendit qu’il y avait été forcé. Marié, vers 1636, à Marie La Barbide, il a surtout demeuré à Québec, tout en s’occupant de la traite de Tadoussac. Il eut un fief à Gentilly et un autre (les prairies de Marsolet) dans la seigneurie et comté actuel de Champlain. Sa descendance nous a donné des prêtres et des hommes de profession qui portent encore son nom. Marsolet mourut (1677) le dernier homme du groupe de 1617, ayant vu la Nouvelle-France à l’apogée de sa gloire sous l’administration de Colbert.

  1. Œuvres de Champlain, notes de M. Laverdière, pp. 1228, 1250.