Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome III, 1882.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
26
histoire des canadiens-français

sépare du fief de Gaudarville, lesquelles lignes ont été tirées, l’une il y a environ vingt-cinq ans, et l’autre il y a environ quarante. »

Si Québec, l’île d’Orléans, la côte de Beaupré et Sillery couraient le danger d’être ravagés par les Iroquois en 1650, combien plus les Trois-Rivières, et surtout Montréal, devaient-ils craindre ! M. Louis d’Ailleboust avait, il est vrai, ajouté aux moyens de défense de cette dernière ville (1646), et en faisant construire (1648), sur la place Dalhousie actuelle, un moulin à vent qui pouvait au besoin servir de redoute et commander les environs, il rendait double service. Des défrichements, commencés en 1648 et poursuivis avec vigueur, éclairaient la place du côté de la forêt et permettaient de découvrir les approches de l’ennemi. Toutefois, la situation des affaires du Canada empêchait M. de Maisonneuve, qui était en France (1646-47), de recruter des colons. La compagnie de Montréal se démembrait, par suite du peu de progrès réalisé durant les six ou sept années écoulées ; un certain découragement s’était emparé des associés, et plusieurs tournèrent leurs vues du côté de l’Orient, où les attiraient quelques nouveaux projets. M. de la Dauversière, embarrassé dans ses finances, ne pouvait plus prêter son aide. La nouvelle organisation de la traite (1648) détruisait celle de Montréal, et, cependant, le changement avait été surtout provoqué par le zèle bien louable de la compagnie de Montréal. Mademoiselle Mance repassa la mer (1649) pour conjurer l’orage qui menaçait d’anéantir son œuvre et celle de M. de Maisonneuve. Elle reconnut, avec surprise, que les associés penchaient plutôt du côté des missions huronnes que pour l’entretien de Villemarie. On conservait encore, en France, l’illusion de la conversion des sauvages. Après bien des pourparlers, il fut résolu que Montréal ne serait point abandonné, et que l’Hôtel-Dieu recevrait deux cents arpents de terre, ce qui le mettrait en état de se soutenir en attendant la paix et d’autres libéralités ; selon sa coutume, madame de Bullion contribua sa large part des secours destinés à la jeune colonie. Outre MM. d’Ailleboust et de Maisonneuve, les membres de la compagnie de Montréal étaient alors MM. de Fancamp[1], de la Dauversière, Alexandre le Rageois de Bretonvilliers, prêtre ; Nicolas Barreau, prêtre ; Roger Duplessis de Liancourt, Henri-Louis Habert de Montmor, Bertrand Drouart, Louis Séguier de Saint-Germain et Jean-Jacques Olier, prêtre, qui fut nommé directeur, en remplacement du baron de Renty, décédé au mois d’avril 1649. M. Le Rageois, très zélé pour Montréal, n’épargna point sa bourse ; il passait pour l’ecclésiastique de France le plus riche en biens de patrimoine. Revenue au Canada (8 septembre 1650), mademoiselle Mance imprima comme une nouvelle vie à Montréal. Aux colons qui avaient pris des terres en 1648, savoir : Pierre Gadois, Simon Richomme, Blaise Juillet, Léonard Lucault dit Barbot, François Godé, Godefroy de Normanville, se joignirent Lambert Closse, Augustin Le Ber, Urbain Tessier dit Lavigne, Louis Prudhomme, Gilbert Barbier, Jean de Saint-Père, Jacques Archambault, Jacques Messier, Antoine Primot, Jean des Carries, Jean Leduc, Nicolas Gode, Jean Desroches, Charles Lemoine, Henri Perrin, André David, François

  1. En 1646, il avait acheté des biens que madame de la Peltrie possédait en France. Il se fit prêtre. (Faillon : Histoire de la colonie, I, 391 ; II, 56.)