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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Par lettre du 4 avril 1670, le roi commanda au père Germain Allart, provincial des récollets, de passer en personne dans la Nouvelle-France avec quatre religieux. D’autres lettres furent expédiées dans le même but à Mgr de Laval, au gouverneur Courcelles et à l’intendant Talon.

À la fin de mai 1670, la flotte partit de la Rochelle pour Québec, où elle arriva après une navigation de trois mois. Elle amenait Talon et dix récollets : les pères Germain Allart, provincial, Gabriel de la Ribourde, Simple Landon, Hilarion Geuesnin, les frères Luc le Français, diacre, et Anselme Bardou, laïque.

Les récollets, écrit le père Le Clerq, « furent reçus par Mgr de Pétrée, M. de Courcelles, gouverneur, les révérends pères jésuites et le grand concours des habitants, avec toutes les marques de joie que l’on pouvait attendre d’un pays où nos pères étaient désirés avec empressement depuis tant d’années. » Talon disait, le 10 octobre de cette année, que plus il viendrait de récollets, plus on parviendrait à déraciner les jésuites.

Il était difficile de rendre aux récollets les terres dont les titres leur avaient été accordés avant 1629. M. d’Avaugour en avait donné une partie à Louis-René Chartier de Lotbinière (29 janvier 1662), et presque tout le reste était possédé par les hospitalières de Québec et par madame veuve Pierre Le Gardeur de Repentigny. Le père provincial se désista de toute prétention sur ces propriétés ; mais, le 23 octobre 1670, M. de Lotbinière lui rendit tout ce qu’il en possédait, et les dames hospitalières et madame de Repentigny consentirent à un arrangement ; c’est pourquoi, le 9 mai 1673, on leur accorda un titre sur dix arpents de front et cent six de profondeur au devant des terres qui restaient aux récollets à la rivière Saint-Charles.

Dès le 4 octobre 1670, la maison des récollets était assez avancée en construction pour que Mgr de Laval y célébrât la messe, ce qui eut lieu avec le plus d’éclat et de pompe possible, au bruit de la mousqueterie et du canon.

Au départ des vaisseaux, le père Allart retourna en France, laissant le père de la Ribourde pour son commissaire et premier supérieur de la mission. Le gouverneur et l’intendant s’engageaient à ne rien négliger dans l’intérêt de cette dernière. Durant l’hiver (1670-71), on transporta les matériaux destinés à l’érection de l’église, dont la première pierre fut posée le 22 juin 1671 avec les cérémonies ordinaires, par Talon.

La paroisse des Trois-Rivières était dans une situation exceptionnelle. Nous ne saurions expliquer ce qui s’y passait depuis quelques années, mais il est certain qu’il y avait deux ou trois partis en lutte touchant la construction d’une église et au sujet des terres des jésuites. L’église, demandée avant 1650, pour remplacer la chapelle des jésuites, avait été construite en 1664 sur un terrain donné aux habitants par M. de Mésy et Mgr de Laval, comme administrateurs de la colonie. Il paraîtrait qu’il était question depuis ce temps de savoir qui serait curé de la ville. D’un autre côté, au Cap-de-la-Madeleine, surgissaient des troubles relativement à l’eau-de-vie. La mission sauvage de ce poste était démoralisée par les traiteurs. Les jésuites cherchaient à prévenir ces désordres, mais ils tenaient magasins eux-