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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Bonne-Espérance, soit que les dits pays nous appartiennent pour être ou avoir été ci-devant habités par les Français, soit que la dite compagnie s’y établisse, en chassant ou soumettant les sauvages ou naturels du pays ou les autres nations de l’Europe[1] qui ne sont dans notre alliance, afin que la dite compagnie ayant établi de puissantes colonies dans les dits pays, elle les puisse régir et gouverner par un même esprit, et y établir un commerce considérable tant avec les Français qui y sont habitués et ceux qui s’y habitueront ci-après, qu’avec les Indiens et autres naturels habitants des dits pays dont elle pourra tirer de grands avantages, pour cet effet nous avons jugé à propos de nous servir de la dite compagnie de la terre ferme de l’Amérique ; laquelle compagnie étant déjà composée de beaucoup d’intéressés et munie de nombre de vaisseaux, peut aisément se mettre en état de former celle des Indes Occidentales et se fortifiant de tous ceux de nos sujets qui voudront y entrer, soutenir cette grande et louable entreprise.

« À ces causes… nous établissons une compagnie des Indes Occidentales, qui sera composée des intéressés en la terre ferme de l’Amérique et de tous (comme ci-dessus)… jusqu’au cap de Bonne-Espérance tant et si avant qu’elle pourra s’étendre dans les terres, soit (comme ci-dessus)… alliance, lesquels pays nous avons concédés et concédons à ladite compagnie en toute seigneurie, propriété et justice, et après avoir examiné les articles et conditions qui nous ont été présentés par les intéressés en la dite compagnie, nous les avons agréés et accordés…

« Comme nous regardons dans l’établissement des dites colonies principalement la gloire de Dieu en procurant le salut des Indiens et sauvages, auxquels nous désirons faire connaître la vraie religion, la dite compagnie présentement établie sous le nom de Compagnie des Indes Occidentales, sera obligée de faire passer aux pays ci-dessus concédés le nombre d’ecclésiastiques nécessaire pour y prêcher le Saint-Évangile et instruire ces peuples en la créance de la religion catholique, apostolique et romaine, comme aussi de bâtir des églises[2] et d’y établir des curés et prêtres, dont elle aura la nomination, pour faire le service divin aux jours et heures ordinaires et administrer les sacrements aux habitants, lesquels églises, curés et prêtres la dite compagnie sera tenue d’entretenir décemment et avec honneur, en attendant qu’elle les puisse fonder raisonnablement, sans toutefois que la dite compagnie puisse changer aucun des ecclésiastiques qui sont à présent établis dans les dits pays, sur lesquels elle aura néanmoins le même pouvoir et autorité que les mêmes gouverneurs et propriétaires des dites îles.

« La dite compagnie sera composée de tous ceux de nos sujets qui voudront y entrer, de quelle qualité et condition qu’ils soient, sans que pour ce ils dérogent à leur noblesse[3] et privilège, dont nous les dispensons, dans laquelle compagnie pourront pareillement entrer les étrangers et sujets de quelque prince et État que ce soit…

  1. Louis XIV recherchait en ce moment une guerre qui lui offrit l’occasion de faire valoir son armée réorganisée.
  2. Voir le titre de la seigneurie de Champlain, cette année.
  3. À plusieurs reprises, Louis XIV invita la noblesse à s’occuper du commerce, déclarant qu’elle ne dérogerait point en entrant dans cette profession.