l’été,[1] la volaille admirable, beaucoup de canards, de bécassines, d’outardes, fort au-dessus de celles de France, les bécasses médiocres, petites, l’ours bon à manger, la patte d’ours fait un morceau délicieux et recherché, l’orignal, espèce d’élan, et le caribou, espèce de cerf, forts bons, surtout en pâté, le mufle est au-dessus de tout ce qu’on peut manger ; on a aussi des pigeons et une quantité étonnante de toute espèce de manne pour le pays, et dans l’arrière saison des petits oiseaux appelés culs-blancs, aussi bons et aussi délicats que les rouges gorges de Verdun. Presque tous les légumes et herbages, comme en France, y viennent bien, les pois verts pour faire de la purée y sont d’une qualité admirable, on n’y connaît pas les petits pois de Paris ; on fait dans l’arrière saison ses provisions d’herbages et de légumes pour tout l’hiver, et ses provisions de viandes qui, étant gelées, se gardent trois ou quatre mois, elles perdent à la vérité un peu de saveur, et lorsqu’il arrive des dégels inattendus on est exposé de perdre ses provisions pour beaucoup d’argent. Le Canada ne produit presque aucun fruit, que des pommes admirables de toute espèce, principalement renettes, calvilles et api ; le plus beau fruit est à Montréal, dans les vergers de messieurs de Saint-Sulpice ; des poires, beaucoup de fraises, framboises et cerises, des melons, de très mauvaises noix qui viennent du côté de Niagara, et des châtaignes médiocres, et un petit fruit sauvage appelé otoka dont on fait des confitures qui seraient trouvées délicieuses en France. Le fleuve Saint-Laurent, les rivières et les lacs produisent abondamment du poisson dont beaucoup sont d’une grosseur énorme ; le saumon y abonde ; les truites fort rares ; presque point d’écrevisses ; beaucoup d’anguilles très bonnes, beaucoup de carpes et de brochets, inférieurs à ceux qu’on mange en France, beaucoup de poissons très vantés en Canada, mais qui n’approchent pas, suivant moi, de notre marée, quoiqu’on vante beaucoup les achégans, les poissons dorés et les maskinongés ; on n’y trouve aucun coquillage ; vers Gaspé, de mauvaises huîtres,[2] et vers les Trois-Rivières on prend un petit poisson qui est très bon en friture, que l’on appelle petite morue, on le dit de même espèce que les grandes morues, je ne le crois pas. J’ai de même ouï disputer que les saumoneaux, que l’on mange à Basle et à Strasbourg, sont d’une espèce différente que les saumons. Le castor, animal amphibie, ayant été décidé maigre est d’une grande utilité, les Canadiens l’aiment beaucoup ; il ressemble assez à du mouton gras de Beauvais ; un goût un peu fade ; il faut le relever avec une sauce piquante ; la queue est un des trois morceaux qui font les délices des Canadiens, et qu’on donne comme tout ce qu’il y a de plus rare avec le mufle d’orignal et la patte d’ours.
Il n’y a nul cabaret sur la route de Montréal à Québec, la seule qui soit beaucoup pratiquée en Canada ; mais l’on trouve des maisons de bons habitants qui exercent noblement l’hospitalité, et on les paye encore plus noblement et arbitrairement. Quand on va dans les Pays d’en Haut ou du côté du fort Saint-Frédéric, on campe avec des petites tentes de toile ou des prélats, et souvent les voyageurs ne se servent que de leurs canots.
Le Canada est un pays extrêmement froid, les neiges y sont abondantes ; dans certains