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HISTORIETTES ET FANTAISIES


Les oranges, les poires, les raisins de table et tant de bons fruits qui croissent et mûrissent loin de nous, ne pouvaient nous parvenir sans coûter des prix ridicules. Lucullus dînait sans bananes sur les bords du Saint-Laurent. Nous avons changé tout cela ; les produits des antipodes sont à nos portes, à bon marché, et je doute que le paradis terrestre ait été aussi bien approvisionné que nous le sommes en ce moment. Nous le serons encore davantage des années prochaines. En même temps, la pomme fameuse de Montréal est à la place d’honneur sur la carte des bons restaurants de Paris.



Celui qui prononçait un discours était obligé de l’écrire, pour faire le bonheur de ceux qui ne l’avaient pas entendu. Nous parlons, et les sténographes prennent nos phrases au vol, les impriment, les répandent, de sorte que nous n’avons plus qu’à parler — seulement, malheur à celui qui parle mal, il n’a pas le temps de se corriger.

Le travail de l’imprimerie était atroce, lent, accablant, irrégulier, sans plaisir. Maintenant, c’est un jeu ; une presse que vous regarder tourner, vous donne vingt mille tirages à l’heure. Autrefois, c’était huit douzaines ou même moins, et l’on mourrait à la peine.

Des gravures mal faites, barbouillés de couleurs impossibles, nous étaient offertes à raison d’une piastre chacune. Nous trouvions cela superbe. Des procédés nouveaux se sont produits et l’on nous vend des chef-d’œuvres à trente sous, mais nous demandons de les payer trois fois moins. Cela viendra.