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les forges saint-maurice

inclinée où passe une branche du gros ruisseau des forges. De là la « mine pure » est envoyée à la fonte.

C’est une grande affaire qu’un haut-fourneau. Il est bâti de pierre dure et revêtu par dedans de briques réfractaires. Une fois allumé il brûle durant deux ou trois ans à toute ardeur, dimanches et fêtes, jours et nuits, et lorsqu’il manifeste un défaut, une faiblesse, on le laisse éteindre, il est démoli et un autre construit à sa place. Qui n’a pas vu le monstre en activité ne saurait croire ce qu’il a d’effrayant. Regardez par les lunettes qui sont au bas et vous verrez la masse liquide, couleur jaune rouge, puis blanche, puis cramoisie qui se tord dans le feu que tourmente une soufflerie de tempête.

Dans le haut de la construction est placé le chargeur qui verse de temps en temps dans le gouffre le contenu d’un panier rempli de minerai, de sable, de fondant et de charbon de bois pour nourrir le feu. Lorsque la quantité de fer en fusion atteint la hauteur voulue, les ouvriers pratiquent une ouverture par laquelle le liquide se précipite et coule vers des rigoles préparées à l’avance dans un sable mouillé que l’on ramène avec de longues grattes pour recouvrir le métal et le laisser refroidir à l’abri de l’air. Lorsque vient le temps de le déblayer, on le casse à coups de masse par tronçons qui prennent le nom de « gueuses ». Dans cet état, il est livrable au commerce pour couler des poêles, des marmites ou pour être transformé en barres, etc., au moyen du martelage. Il n’est pas besoin de réfléchir longtemps si l’on veut se rendre compte de la variété d’industries dans lesquelles entre le fer. Aux forges Saint-Maurice cette limite était restreinte et je ne crois pas qu’on ait jamais dépassé, du temps des Français, la production des ustensiles qui nécessitent le moins d’outillage. Toutefois, cela comportait sept ou huit branches du métier