Page:Sur la Tombe de Huysmans, Collection des Curiosités Littéraires, 1913.djvu/14

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était d’un siècle où quelque chose coulait encore des fontaines de lait du Moyen Âge et il ignorait les épuisements et les dessèchements du nôtre. Il avait les émollients de quelques amusettes intellectuelles. Il était janséniste et admirait au moins Montaigne. Il s’asseyait quelquefois, avec une moitié de bonhomie, chez ce glaireux marchand de capotes philosophiques.

Ici, rien de pareil, nous sommes à l’extrémité de tout. Le catholicisme ne suffit pas à cet enragé, parce que la présence eucharistique réelle n’est pas assez, il lui faut la présence sensible, quoiqu’il ne le dise pas et quoique, peut-être, il l’ignore. C’est le mal étrange et nouveau des êtres supérieurs en cette fin de siècle[1] si mystérieusement exceptionnelle. On ne veut plus d’un Dieu qui se cache. On commence à vouloir d’un Christ visible des yeux du corps, éclatant, fulgurant, terrible, incontestable. On se dit que les hommes qui vivaient à Jérusalem ou en Galilée, dans les premières années de l’ère chrétienne, ont pu voir Celui que les Chrétiens adorent et que l’Église catholique appelle Dieu fait homme et Père des pauvres ; qu’il leur était sans doute plus


  1. Écrit en 1884. J’étais, alors, jeune encore, et cela se voit, surtout lorsque je nomme Pascal, vingt lignes plus haut. L. B.