Page:Sur la Tombe de Huysmans, Collection des Curiosités Littéraires, 1913.djvu/17

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C’est effrayant de force contenue, de violence refoulée, de vitalité mystérieuse. Huysmans tasse des idées dans un seul mot et commande à un infini de sensations de tenir dans la pelure étriquée d’une langue despotiquement pliée par lui aux dernières exigences de la plus irréductible concision[1]. Son expression, toujours armée et jetant le défi, ne supporte jamais de contrainte, pas même celle de sa mère l’Image, qu’elle outrage à la moindre velléité de tyrannie et qu’elle traîne continuellement, par les cheveux ou par les pieds, dans l’escalier vermoulu de la Syntaxe épouvantée.

Après cela, qu’importe la multitude des contradictions ou des erreurs qui tapissent, à la manière d’anormales végétations, le fond d’un livre où se déverse, comme dans la nappe d’un golfe maudit, tout l’azur de l’immense ciel ? Qu’importe, par exemple, que l’affreux cuistre Schopenhauer soit presque égalé à l’auteur de l’Imitation ; Joseph de Maistre jugé ennuyeux et vide, par la plus incompréhensible des répugnances, et mis au-dessous de cet académique plumassier M. de Falloux ?

Qu’importe que des Jocrisses déments tels que Mallarmé soient adorés au désert par cet hébreu en plein Exode, tandis que Barbey d’Aurevilly est


  1. Que pourrait-on dire de plus d’un écrivain de génie ? L. B.