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un vieux manuscrit est de notre droit ; car qui peut prouver qu’avant la magnifique invention de l’imprimerie il ne s’est pas égaré mille écrits divers, et que ce manuscrit, relatant un haut fait si commun lors de l’invasion des Normands, n’exista pas ?

À ce propos, nous pensons qu’il est temps de dire que les documents soi-disant historiques qui nous sont parvenus sur le géant douaisien, ne sont nullement fondés. À peine affirme-t-on la date où sa fête commença. Nous avons consulté les recherches de M. le conseiller Quenson qui a peu ajouté aux travaux antérieurs de M. Duthilloeul ; et rien n’est venu éclairer l’obscurité où se perd la naissance de Gayant. Ce que nous avons remarqué, c’est que l’Église, en accaparant toutes les fêtes, a englouti toutes les légendes dans la mer des miracles et des panégyriques de ses saints, lesquels ont pendant longtemps fait ombre sur les héros.

Gayant est-il simplement l’ostensoir ou joyau de la corporation des mandeliers, comme le pense M. Quenson ? ou bien, est-il un héros antique que quelque loi ancienne et perdue aurait déjà proscrit des fêtes, comme le firent des mandements qui, grâce à leur date peu éloignée, ou grâce à l’imprimerie, nous ont été conservés ? Là est la question insoluble. On dit aussi que S. Maurand sauva la ville de Douai d’une surprise, tentée par l’amiral Coligny, et que, par l’effet d’un miracle du saint, le sonneur, qui se refusait presque à sonner matines pour éveiller les fidèles, sonna sans le vouloir l’alarme et le tocsin.

À travers cette fable, ne devine-t-on pas les efforts des Espagnols catholiques pour faire tourner à leur profit quelque dévoûment inconnu, attendu que l’amiral étant