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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/32

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très-courtes[1], qui morcellent les montagnes en contre-forts ; quelquefois même, dans de simples dépressions. Leur pente excède 6 centimètres par mètre, sur la plus grande longueur de leurs cours : elle varie très-vite, et ne s’abaisse pas au-dessous de 2 centimètres par mètre.

Ils ont une propriété tout à fait spécifique. Ils affouillent dans une partie déterminée de leur cours ; ils déposent dans une autre partie ; et ils divaguent ensuite, par suite de ces dépôts. Cette propriété, formée par un triple fait, ne se retrouve dans aucune des deux classes précédentes : elle fournit un caractère bien tranché.

Remarquons de suite que cette définition des torrents n’est plus celle qui est usitée généralement.

Dans le langage ordinaire, on appelle torrent tout cours d’eau impétueux[2]. — Dans les traités d’hydraulique, le torrent est un cours d’eau, coulant sur des pentes très-fortes, grossissant extraordinairement dans les crues, et sujet à tarir pendant une partie de l’année[3]. Dans les Hautes-Alpes, la plupart des torrents ne tarissent jamais ; plusieurs même ont un volume d’eau constant, et si considérable, que dans d’autres pays, et sur des pentes moins fortes, on les assimilerait aux rivières. — Dans l’ouvrage de Fabre[4], le torrent est défini : « Un cours d’eau, violent dans les crues, dont le lit est variable, dont les crues sont de courte durée, et dont les pentes sont irrégulières. » On le voit de suite. La propriété distinctive des torrents ne ressort pas dans cette définition. Elle n’énonce qu’un seul des trois faits, qui constituent nos torrents, savoir : la mobilité du lit. Mais ce n’est pas là, ni un fait caractéristique, puisqu’il est commun aux torrents et aux rivières ; ni un fait fondamental, car nous verrons par la suite qu’il dérive des deux autres. La définition de Fabre donne l’idée de torrents, dont les effets seraient vagues, très-affaiblis, et difficiles à spécifier nettement. La suite de l’ouvrage confirme cette supposition.

  1. Les torrents les plus allongés n’atteignent pas cinq lieues de cours.
  2. Dictionnaire de Boiste.
  3. Par exemple, dans le Dictionnaire des travaux publics de M. Tarbé de Vauxclairs.

    Suivant Lecreulx, le torrent « est une masse d’eau réunie, qui coule sur une pente très-rapide… » Il définit cette pente de six lignes par toise, ce qui fait un peu moins de sept millimètres par mètre (voyez son ouvrage cité, page 151 et suivantes). À ce compte la Durance serait un torrent.

  4. Page 35 et suivantes.