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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/81

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sement commet, ce qui serait le seul moyen de rendre les défenses parfaitement inoffensives, et partant, d’en tirer le plus grand avantage possible.

Le décret du 4 thermidor a principalement abouti à multiplier les endiguements d’une seule rive. Or, d’après ce qu’on vient de voir, cette défense, de quelque manière qu’on la dispose, est toujours plus ou moins hostile à la rive opposée ; et l’effet bienfaisant, toujours suivi d’effets nuisibles, qui fomentent les haines et les procès.

Quel doit être, dans cette circonstance, l’esprit de l’administration ?

Parce qu’il est impossible à une rive de construire des défenses, sans donner à la rive opposée, sinon le droit, au moins le prétexte plus ou moins fondé de se plaindre, s’ensuit-il qu’on ne doive jamais autoriser une rive à se défendre sans l’assujettir à indemniser la rive opposée ? — Non, mais il s’ensuit seulement que si l’administration accorde cette autorisation à l’une des rives, elle doit toujours l’accorder implicitement à la rive opposée ; car, de cette manière, tout devient égal des deux côtés. — C’est là en effet ce qui se fait toujours. Aussitôt qu’une demande d’endiguement est adressée à l’administration, elle fixe dans un plan la direction à donner à l’axe moyen du torrent, et elle trace les défenses sur l’une et l’autre rive. Ce plan embrasse le cours du torrent sur une grande longueur ; il ne détermine pas seulement l’alignement demande par les pétitionnaires, mais l’alignement de toutes les défenses voisines, que les premiers ouvrages pourront rendre nécessaires. Il fixe le tracé de l’encaissement complet du torrent, et l’alignement pétitionné ne devient plus ainsi que l’extrait d’un plan d’alignement général. Ce plan, déposé au chef-lieu de la commune, et soumis à l’inspection de tous les intéressés, sert de base à une enquête de commodo et incommodo.

Toutes ces dispositions étant ainsi prises, l’administration dira aux réclamants :

« De quoi vous plaignez-vous ? De ce que j’ai permis à la rive opposée de se défendre ? Mais je vous donne à vous-mêmes la même faculté. Pourquoi n’en usez-vous pas ? Vous avez sous les yeux le plan des lignes de défense : défendez-vous, en vous y conformant, de même que l’autre rive s’y est conformée. — Parce que vous vous endormez sur le mal, d’autres propriétaires, moins imprévoyants que vous, ou plus maltraités, seront-ils réduits à se laisser ruiner par le torrent, sous le prétexte qu’en se défendant, ils vous obligent à vous défendre