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COUP D’ŒIL SUR LES FOUILLES.

spirale en vieux caractères hébraïques. Le texte doit reproduire des formules de purification ou d’incantation. Un peu partout se présentent des objets plus ou moins intacts : coupes de calcaire à nummulites, lampes de terre cuite, fers de flèche, flacons de verre si friable qu’on n’ose les toucher.

De nombreux débris de matériaux émaillés perdus dans les éboulis, la rencontre de murailles toujours construites avec des briques crues, m’amènent à penser que les monuments susiens, bâtis en terre comme les édifices de Babylone, devaient leur beauté à des revêtements inaltérables, qui protégeaient les maçonneries peu résistantes de leur nature et remplaçaient les bas-reliefs des palais assyriens.

La frise des lions découverte devant l’apadâna d’Artaxerxès Mnémon est un spécimen de cette merveilleuse ornementation.

11 avril. — La mission jouissait — inappréciable bonheur — d’un mirza tout entier ; aujourd’hui nous possédons la paire. Cependant le premier n’a pas été mis en morceaux. Taguy, notre mirza de rechange, vient aider Abdoul-Raïm à nous faire les honneurs de Suse.

Nous ne sommes pas gras ! À quel état, grand Dieu ! vont nous réduire ces deux sangsues ?

Le colonel a-t-il demandé un homme de confiance pour le suppléer quand il lui prend fantaisie d’aller respirer l’air de Dizfoul, ou bien encore Mirza Taguy serait-il simplement l’espion d’Abdoul-Raïm ? Mystère !

Ce nouveau fonctionnaire apportait le premier courrier de France, que lui aurait remis, assure-t-il, un négociant arrivé de Bassorah depuis peu de jours. Revoir l’écriture d’êtres aimés, entendre un écho du paradis perdu, quelle jouissance pour des exilés ! Les nouvelles se complètent les unes les autres, et les lettres se parcourent en commun, car les enveloppes sont ouvertes, les feuilles lacérées et mêlées. Chacun doit reconnaître son bien. Au milieu de cette macédoine épistolaire s’est rencontré un billet que nul pourtant n’a réclamé. Il était signé : Aïcha. Mçaoud ayant été mandé à la barre, M. Houssay lui lut le poulet suivant :

« Mon très cher ami,

« Cette lettre n’a d’autre but que de te donner de mes nouvelles. J’espère que tu es aussi en bonne santé.

« Je suis toujours sans le sou. Cette nouvelle ne doit pas te surprendre : c’est ainsi que tu me laissas il y a quatre mois.

« Je te salue en t’embrassant.

« Ton épouse fidèle,

« Aïcha. »