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DÉCOUVERTE D’UN ESCALIER.

blanche, plus serrée que celle des lions. Chaque brique est carrée, mince, démaigrie en lame de couteau, de façon à faciliter les contacts superficiels du parement, et à ménager cependant la place d’une épaisse couche de mortier.

Les messagers de la fortune fréquentent si rarement notre planète, qu’ils n’osent s’y hasarder seuls.

Un de ces soirs, comme je visitais, après la fermeture des chantiers, une crevasse voisine du camp, j’ai glissé sur une matière dure, que je n’avais pas aperçue à travers les herbes.

Courir aux tentes, saisir une pioche et dégager six ou sept briques émaillées, fut l’affaire d’un instant. Au-dessous de la première assise j’en trouvai une seconde, puis une troisième, disposées le long d’un parapet réparé aux temps des Sassanides. La fouille, vivement conduite, nous a donné des émaux d’une tonalité et d’un dessin nouveaux. Les fonds, d’un vert rompu, supportent des fleurs de lotus jaunes et bleues, qui se superposent et se terminent par une palmette blanche. Au ton près, il me semble revoir les peintures murales de certains tombeaux des Ramsès.

D’autres pièces, à fond paille, coupées en diagonale par une ligne orange, rappellent les dispositions caractéristiques d’un limon d’escalier. Enfin, de grandes dalles carrées, mesurant 0m, 36 de côté et 0m, 08 d’épaisseur, émaillées sur les tranches et sur le plat, sont décorées d’une rosace jaune et verte. Marcel assure que nous exhumons une rampe dont les formes et les ornements, si ce n’est la matière et les dimensions, rappellent les mains courantes des palais persépolitains. Artaxerxès, en prince sage, s’était servi, pour construire ses palais, de matériaux empruntés aux édifices bâtis sous ses prédécesseurs ; les Sassanides, non moins économes, réparèrent un mur d’enceinte avec les briques arrachées aux monuments achéménides.

Aux fleurs de lotus se mêlaient des inscriptions cunéiformes blanches sur le fond vert, des souliers jaunes ou bleus se boutonnant sur une jambe noire, une main brune entourée d’un bracelet et serrant une canne d’or, des fragments de draperies à fond blanc sur lesquelles se détache l’image symbolique de la citadelle de Suse.

Quand les grands seigneurs du moyen âge faisaient broder à leurs armes cotes et manteaux, ils ne songeaient pas qu’ils imitaient les princes susiens. Ignorance pardonnable : jusqu’à ce jour, nul n’avait eu l’idée de faire remonter l’origine des armoiries jusqu’à Oumman Minanou ou à Koudour Nakhounta.