Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/17

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blent des iris, se trouve à l’entrée du petit hameau, au fond d’un jardin plus grand que les autres, qui affecte même des ambitions de potager.

Et lorsqu’un fiacre antédiluvien m’y déversa en cahotant, avec mes bagages, dans cette placide rue du Montparnasse, quel effort il me fallut pour me convaincre que j’étais bien réellement à Paris ! (Paris, c’est-à-dire l’Opéra, les Champs-Elysées et la place Vendôme.) Ici, rien que des maisonnettes incohérentes qui, au milieu de timides jardinets, ressemblent aussi bien à des pigeonniers, des chapelles de campagne ou des belvédères de stations alpestres qu’à des logements pour familles parisiennes. Il y a une minuscule cahute peinte en rouge sang et surmontée d’un tonneau également rouge qui semble faite pour abriter un kobold des contes de Grimm. Au coin de la rue Notre-Dame-des-Champs, c’est toute une petite forêt vierge, foisonnant de lilas, mûriers, chardons et orties, d’où émergent à peine des cases qui semblent construites en papier d’emballage. La cuisine se fait en plein air ; la lessive aussi. Ça doit être bizarre de sortir de ce camp de romanichels pour aller acheter son pétrole et son café dans une des grandes épiceries violemment illuminées de la rue de Rennes…