Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/37

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Aujourd’hui, en déjeunant dans la crèmerie de la rue du Dragon, où je prends parfois mon repas de midi, à côté de jeunes gens dont la sobriété m’étonne toujours, j’aperçois dans un coin d’ombre un profil de connaissance, éclairé par la petite lueur rose d’une cigarette qu’on allume. C’est Marcel Barral. Il échange de brèves réflexions avec un Japonais, à la jaune figure plate et murée de mystère oriental, tout en achevant tranquillement l’ascétique repas à 1 fr. 25, annoncé sur les pancartes de la devanture (moi, il me faut toujours des renforts de jambon ou de poisson grillé). Une heure sonne. Il se lève, décroche son feutre et passe devant ma table. Un petit arrêt surpris ; un coup de chapeau.

« Ah ! c’est vous, Mademoiselle ?… Il y a bien longtemps que je n’ai eu le plaisir de vous revoir…

— Si longtemps que ça, vraiment ?

— Mais, oui ; je le trouve en tous cas… Vous deviez m’écrire…

— Par exemple ! C’est vous qui m’avez dit : « Je