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hélène swarth.

V.

PRINTEMPS.


Le rossignol se tait, voici la fraîche pluie,
Comme des pieds légers trottinant sur les toits.
Voici le vent qui mêle aux odeurs de la suie
L’arôme des blés verts et l’haleine des bois.

Les parfums des lilas épanouis d’extase
M’effleurent dans mon lit, étroit comme un cercueil,
Mais les plumes de paon, en gerbe dans un vase,
Me défendent le rêve et m’enjoignent l’orgueil.

Effluves énervants de l’amoureuse terre,
Je ne laisserai pas troubler mon cœur par vous.
Croisant mes bras altiers sur mon cœur solitaire,
Je brave le printemps et les parfums trop doux.

Je scellerai d’un sceau ma bouche encore avide
Des longs baisers d’amour où tout l’être se fond
Et mes doigts caressants, n’étreignant que le vide,
Se joindront sur mon cœur douloureux et profond.